Dans exactement sept mois, le peuple béninois va faire ses adieux au Président Yayi Boni qui aura été le troisième président du renouveau démocratique et le deuxième qui aura fait deux mandats consécutifs. Mais que retenir du passage du Dr de Tchaourou ? Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il y a eu plus de regrets que de succès.
Le 06 avril 2006, un homme moins connu de la sphère politique béninois prenait le pouvoir face à un vieux de la vieille, le Président Adrien Houngbédji. En deux ans, l’homme entreprend de grandes réformes, à commencer par l’administration publique qui désormais était à l’heure. Les résultats sont perceptibles en témoigne les statistiques économiques de 2006 à 2008. Yayi Boni, puisse que c’est de lui qu’il s’agit, est le président qui a le plus osé, qui a été beaucoup plus entreprenant. On peut citer comme exploits réalisés, la mise sur pied d’une liste électorale permanente, le développement d’infrastructures routières et socio-économiques, la construction d’une usine de montage de tracteurs, les réformes entreprises au port, l’accès aux services de base (gratuité de l’école pour les filles, gratuité des frais à l’université, achat de nouveaux bus pour les étudiants, la gratuité de la césarienne…), la construction de nombreux centres universitaires, l’électrification rurale, l’énergie solaire pour tous, les recrutements massifs dans la fonction publique, l’élaboration du code de la famille…On peut également noter les reformes allant dans le sens d’améliorer le climat des affaires sans occulter la couverture du territoire en ce qui concerne la télévision et la radio nationale. Les changements d’attitude comme le port du casque, l’immatriculation des engins à deux roues et le projet « 10 millions d’âmes, 10 millions d’arbres » invitant à planter des arbres à toute occasion, font également partie des succès de Boni Yayi. On peut donc sans risque de se tromper dire que le Président Boni Yayi a posé de nombreuses pierres dans la construction d’un Bénin qu’il voulait émergent. Mais, malgré tout ceci, il y a trop de grincements de dents.
Les regrets du peuple béninois…
Si le commun des béninois est d’avis que le régime du changement-refondation a réalisé d’énormes exploits, il est aussi important de préciser qu’il a beaucoup péché dans la méthode ; ce qui fait que les regrets ont pris le pas sur les succès. D’abord, une mauvaise planification et la précipitation dans la conduite des initiatives n’a pas permis à certaines réformes de prospérer, se heurtant aux résistances des populations. C’est le cas par exemple de la gratuité à l’université, le régime d’assurance maladie, le port obligatoire du casque, l’immatriculation des engins à deux roues, la révision de la constitution et autres. Le slogan « ça doit changer, ça va changer, ça peut changer » est resté à l’étape de slogan. La corruption, en dépit de la marche verte, n’a pas eu d’adversaires. C’est sous le régime du changement que le Bénin a connu les plus gros scandales de son histoire, à l’insu du Président de la République, qui pour la plupart du temps n’était pas informé. On citera l’Affaire Cen-Sad, le PVI-NG, la LEPI, l’affaire PPEA 2, l’Affaire ICC et consorts…Ensuite, les regrets viennent également du choix des collaborateurs. Nombreux sont les fidèles collaborateurs de Boni Yayi qui sont tombés en disgrâce avec lui-même; parce que le plus souvent mêlés à des affaires pas trop « catholiques ». En témoigne, les nombreux remaniements intervenus lors de son règne. Est-ce à dire que le Chef de l’Etat s’est entouré de mauvaises personnes ? Difficile de répondre à une telle interrogation. Chacun pourra en tirer ses conclusions.
La violation des libertés, la non tenue des élections à bonne date et la tricherie dans l’organisation des différents concours pour finir, ont achevé de ternir le règne de Boni Yayi à la tête du pays. Jamais le Bénin, depuis le renouveau démocratique, n’a eu autant de personnes en exil, alors que le pays ne vit pas une crise majeure. A regarder, le profil des personnes en exil, on peut bien s’inquiéter : journaliste, juge, avocat, hommes d’affaires et autres. De 2008 à ce jour, les contestations et conflits liés aux élections sont devenus légion, occasionnant de nombreux dégâts matériels et même parfois, des pertes en vies humaines.
Le rêve brisé du changement
L’aéroport de Glo-Djigbé, la route des pêches, le projet « grand Cotonou », les villages du millénaire, l’aéroport de Tourou, qui sont les projets majeurs de Boni Yayi à l’entame de son mandat, ne pourront voir le jour sous son règne. A sept mois de la fin de son mandat, ça sera un miracle si l’un de ses projets arrivait à être réalisé. Même la mise en service totale de la centrale thermique de Maria Gléta n’est pas si sûre. Le Bénin dispose néanmoins de tous ses projets sur papier. Les prochains gouvernants pourront faire du rêve de Yayi une réalité. A condition que le bon président soit choisi. Un Président qui fera de la restauration des valeurs et de l’éthique dans la gestion des affaires publiques, sa priorité des priorités. 2016, est un virage très important. Si jamais ce virage est mal négocié, le Bénin est foutu pour 50 ans encore. Le peuple béninois n’a donc pas droit à l’erreur.