- Des manœuvres sont en cours dans la Cour de Holo pour valider sa candidature
- Lire l’indignation du professeur Faustin AÏSSI
De sources dignes de foi, malgré qu’il soit frappé par les limites de l’âge requis, Komi Koutché serait en train de nouer un deal avec la cour constitutionnelle en vue de pouvoir se présenter à l’élection présidentielle de 2016. Si cela aboutissait, ce serait un crime contre la démocratie béninoise.
En politique, tout est permit, dit-on souvent. Les coups bas pour détruire l’adversaire et l’écarter de son chemin, les improbables alliances de circonstances et même les deals à couper le souffle ont aussi droit de cité. Alors que l’âge pour se présenter à l’élection présidentielle au Bénin est fixé entre 40 et 70 ans, selon la constitution du 11 décembre 1990, des autorités politiques au sommet de l’Etat manœuvreraient dans l’ombre afin d’obtenir le contournement de cette disposition constitutionnelle non négociable. En effet, cela faisait un bon moment que l’information relatif à la candidature de Komi Koutché à l’élection présidentielle de 2016 circulait dans les cercles des personnes bien renseignées. Et, de plus en plus, signe après signe, cette information semble se préciser. De sources dignes de foi, le ministre de l’économie et des finances, qui n’a pas l’âge constitutionnellement requis pour se présenter à l’élection présidentielle de 2016, aspire briguer la magistrature suprême et s’y prépare sérieusement. Il rêve même d’être le successeur du Dr. Boni Yayi au soir du 06 avril prochain. Il serait, selon certaines indiscrétions, le dauphin désigné du Chef de l’Etat et tout serait en train d’être mis en œuvre pour qu’aucun obstacle ne puisse l’empêcher de se présenter à la prochaine élection présidentielle. C’est ainsi, qu’après des négociations très âpres, un ‘’marché’’ serait en train d’être conclu dans la Cour de Holo afin que la jurisprudence appropriée soit trouvée pour que le moment venu, Komi Koutché puisse à se porter candidat à l’élection présidentielle de 2016 au même titre que les autres candidats. Même si dans l’entourage du ministre d’Etat, on semble avoir le bœuf sur la langue, certains de ses proches pensent que la machine est en marche et qu’il faudra indubitablement s’attendre à la candidature du grand argentier national à la présidentielle de 2016. L’heure est donc à la vigilance et à la prudence, car si cela était confirmé, c’est la démocratie qui serait mise à mal. La bataille pour la préservation des acquis démocratiques n’est donc pas encore terminée, même maintenant qu’il ne fait l’ombre d’aucun doute que Yayi Boni ne briguera pas un autre mandat. Le peuple béninois dans toutes ses composantes doit se lever comme un seul homme pour barrer la route à tous ceux qui veulent passer outre les dispositions constitutionnelles pour imposer cette candidature. Le Bénin est un Etat de droit et dans un Etat de droit les règles de droit doivent être respectées. La constitution du Bénin est sacrée. Les béninois en sont jaloux. Ce n’est pas Holo qui viendrait foutre le bordel dans l’ordre établit. D’ailleurs depuis samedi, il y a une décision qui soulève une vive polémique et prouve qu’il y a un complot en gestation contre la démocratie béninoise. Déjà des voix s’élèvent pour critiquer cette décision.
Voici par exemple le point de vue Faustin AÏSSI
La décision DCC 15 – 156 du 16 juillet 2015 que vient de prendre la cour constitutionnelle présidée par Théodore HOLO est surprenante et étonnante de la part d’un Professeur d’université, Spécialiste de droit constitutionnel. L’universitaire que je suis est atterré par ce qui apparaît à l’évidence pour une malhonnêteté intellectuelle mise au service d’une classe politique totalement décrédibilisée par des affaires scandaleuses de détournements de fonds publics qui insupportent de plus en plus les partenaires internationaux.
Certes, je suis Docteur ès – Sciences Physiques, Spécialiste de Chimie – physique et la déontologie universitaire ne m’autorise pas à aller contester un collègue dans sa discipline de spécialité. Toutefois, j’ai été en fin de carrière 12 ans 1er Vice-président et Président du conseil d’administration de mon université par ailleurs pluridisciplinaire. J’ai donc eu à rapporter souvent dans notre commission de spécialistes de droit pour la promotion de mes collègues juristes de la section 1 (droit public) du CNU candidatant à la promotion de professeur. Je rappelle qu’il y a deux rapporteurs et le second est nécessairement du domaine de la spécialité en l’occurrence ici le droit. C’est donc un domaine scientifique qui ne m’est pas totalement étranger ni inconnu.
Par ailleurs jusqu’en 2014, j’ai pendant 20 ans été Président de bureau de vote de ma ville de Villeneuve d’Ascq aux élections locales et nationales. S’il y a donc un domaine qui ne m’est pas étranger, c’est bien le code électoral français.
Venons-en à la décision DCC 15-156 sur laquelle plusieurs observations pourront être faites :
- La cour est saisie par un candidat né le 19 novembre 1976 classé 3ème et non retenu pour raison de limite d’âge dans un processus interne de désignation à l’élection présidentielle tandis qu’un autre candidat né en Novembre 1976 classé 4ème serait retenu. Je note d’abord qu’il ne s’agit pas des deux candidats classés 1er et 2ème qui à priori sont les meilleurs. Il n’y a donc pas péril en la demeure puisque le parti aura de toute façon un bon candidat retenu.
- La cour valide les deux candidats pour raison « d’égalité de traitement des citoyens » d’une part et du fait que le jugement supplétif en l’occurrence a été préféré à un acte naissance. Mais avec le même raisonnement, la cour aurait pu invalider les deux candidats qui « auront bénéficié de la même égalité de traitement » parce qu’en matière d’âge, le jugement supplétif n’est qu’un acte compensatoire du tribunal face à un acte de naissance qui donne avec exactitude l’âge de la personne et par voie de conséquence le parti ne saurait privilégier le 4ème candidat au détriment du 3ème d’autant que si l’on peut comprendre l’existence du jugement supplétif pour les enfants nés au début de la colonisation française au Dahomey (fin XIXe siècle), cela l’est moins en fin du XXe siècle sous l’ère Kérékou I.
- Enfin, par une argumentation spécieuse, « que l’âge atteint par une personne au cours d’une année civile donnée, c’est-à-dire, à une date quelconque de cette année correspond à l’âge atteint par cette personne au 31 décembre de l’année en question en application de l’adage de droit français « Année commencée, année acquise », du latin, « annus incoeptus habetur pro completo », qui signifie : « L’année entamée doit être tenue pour écoulée », la cour va étonnement chercher à la rescousse un « adage » du droit français en réalité comme « jurisprudence » en se dispensant de la rigueur d’usage qui est de citer l’arrêt concerné de manière à ce qu’on sache le contexte dans lequel il a été pris. Dans ces conditions un enfant né le 19 Novembre 1997 ne bénéficiera pas d’un tribunal pour mineur et peut être condamné au pénal au mois d’août 2015 à 30 ans de prison pour un crime odieux commis le 2 janvier de cette année 2015.
Pour autant, c’est tout de même sur le terrain électoral que cette décision de la cour constitutionnelle aurait dû avoir plus de cohérence avec la législation française appelée en renfort. En effet, voici ce que dit la réglementation française pour ses élections : « Pour pouvoir se présenter aux élections municipales, le candidat doit remplir les conditions suivantes :- avoir 18 ans révolus (article L. 228), étant précisé que l’âge minimum requis pour être maire, fixé précédemment à 21 ans révolus a été abaissé à 18 ans par l’article 7 de la loi n° 2000-295 du 5 avril 2000 relative à la limitation du cumul des mandats et des fonctions électives et à leurs conditions d’exercice. Pour les autres élections : – être majeur ou avoir atteint un âge minimal (il faut être âgé d’au moins 18 ans pour se présenter aux élections présidentielles ou législatives, et d’au moins 24 ans pour se présenter aux élections sénatoriales). La condition d’âge s’apprécie au jour de l’élection et non du dépôt de la candidature ». (voir document joint en copie).
Cela est d’autant plus vrai que les listes électorales étant closes au 31 décembre de l’année précédant le vote, seuls sont autorisés à s’y inscrire les jeunes qui ont eu 18 ans entre le 1er janvier et la veille de la date du scrutin. Le cas de 2012 est exemplaire avec les présidentielles au mois de mars et les législatives au mois de juin. Le jeune né avant le jour du scrutin présidentiel a voté aux deux élections et celui qui est né après le mois de mars n’a voté qu’aux législatives. Pourtant, la constitution française prône aussi l’égalité de traitement des citoyens devant la loi.
Il est bien triste que les élites béninoises qui plus est, grands professeurs titulaires d’universités puissent autant être serviles frisant la « prostitution » devant un pouvoir politique si moribond !
Faustin AÏSSI
Professeur émérite de l’ULCO
(Université du Littoral Côte d’Opale)
Communauté d’universités et d’établissements
de Lille – Nord de France (COMUE – LNF)
B.P. 70008 – 59651 Villeneuve d’Ascq Cedex
faustin.aissi@outlook.fr